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Un phare dans la forêt


L’eau coule doucement sur les parois de la douche, 

il n’y a pas d’étoile dans le ciel, 

J’ai cru entendre s’élever le soleil au crépuscule et 

ses nuages rougissent par-dessus. 


Non, je n’ai pas dormi cette nuit et je ne dormirai pas demain. 

J’entends l’aube éveiller ses silences sous les saules, 

et les oiseaux chantent le trépas du ciel. 


Le creux dans le coeur s’intensifie

dans une putréfaction brève,

le coeur se meurt, 

le corps aussi. 


D’ennui peut-être.

Surement.


Je tourne en rond, 

éternel dans une matinée noyée sous la rosée. 

Je me noie. 

Sous la douche, 

dans mes propre poumons,

j’explose.

Le corps amer se meurt encore, 

et du sang noire coule avec l’eau. 


Je ne me souviens pas encore du passé, 

celui qui se tend, qui se tend doucement sous mes pieds. 

Dans la cuisine du lait périmé, 

des visages accrochés, encadrés, 

trop de fruits qui dépassent du panier

Trop de peur qui dépasse du corps. 


Je ne sais plus. 

Si les mots étaient suffisants j’écrirai l’amour,la mer, la mort, l’amer, et le silence. 

Où je n’écrirai pas du tout. 


Je suis encore éveillé. 

Et la nuit semble courte, 

elle hurle des silences sauvages, 

des points lumineux de renards passant sous les feuilles. 

L’automne déshabille les arbres, 

et la cime s’entrelace avec le vent. 

Le sapin ne meurt jamais.

Je suis comme ce sapin. 

Immortellement insomniaque. 

Le vent me pousse la nuit, 

je suis effrayé par mes propres pommes de pin, 

je me blesse avec mes propres aiguilles, 

et je meurs parfois, 

avant de renaître sur la table du salon, 

la tête dans les bras 

14H33. 


Je ne travaille plus. 

Je n’existe plus. 

La maison est l’univers qui m’habite,

5 galaxies, 

ma chambre

le salon

la cuisine

la salle de bain

les toilettes.


Je ne parle ni de la cave, ni du vieux grenier. 

Je n’y mets pas les pieds. 

Tout est inondé. 

Le coeur, 

la peau, la chair, 

La cave

le grenier.

Je respire l’eau qui embrase mes poumons. 

14H33. 

Et le vide. 

Et la peur. 


14H33. 

Il arrive que des gouttes d’eau tombent du plafond. 

Des gouttes immobiles déchirant la peinture blanche

ternie par le temps. 

Je suis terni par le temps. 


Au fond, je ne suis pas fait pour le monde, 

Il y a des nuages trop denses sur les collines, 

et les arbres ventent les brumes dans le couloir. 


Je n’entends plus mon coeur ce soir,

ni les horloges dans la maison. 


Dans la nuit noire, 

les silences du temps s’emmêlent dans l’écume 

des étoiles. Je n’ai pas vu minuit, mais 2H 

puis 3 puis 4. 

Je crois avoir dormi, 

j’ai rêvé du soleil sur mes épaules. 

D’une chaleur enlaçant mon corps.

D’un sommeil profond, 

d’un regard illuminé. 

J’ai rêvé de yeux dans le noir, 

de visages putrides dans la boue. 

D’une pluie ardente sur les murs. 


Puis après je ne rêve plus. 

Je reste silencieux dans la chambre noire, 

fixant ce qui pourrait être l’ombre du plafond. 


Je ne me reconnais plus dans le miroir, 

le monde semble fade sous mes pieds, 

j’ignore encore les dessous du soleil. 


La mort m’assaille trente fois par jour. 

Il n’y a qu’elle qui comprends les vestiges de 

mes veines. Elle comprend les ressacs de mon corps et les lettres abandonnées sur mon bureau. 


Encore le temps, 

long et lent, 

large sur les murs, 

battant la mesure chaque seconde. 

La mort. Les murs. La mer. L’amour. 

J’aurais fait l’amour avec le temps, 

pour pouvoir dormir quelques heures. 


Dans la nuit noire, 

minuit sonne. 

On entends coasser quelques grenouilles, et 

les criquets chantent à la lune de sombres secrets 

Je n’entends rien, 

que les battements incessants de mon coeur, 

de l’horloge du couloir, 

du silence du vent. 


Par la fenêtre, une ombre blanche frôle la maison. 

Là, comme ça,  elle passe. 

Elle enchâsse le grillage, puis passe. 

Elle passe. 

J’ouvre la fenêtre. 

Qui est là ? 

Je cherche mes clés. 

Je cherche la bonne clé, 

j’ouvre. 

Qui est là ? 

Dans la nuit sombre, 

au fond du jardin boisé, 

un homme s’enflamme. Il s’enflamme mais ne hurle pas. 

Il ne dit pas un  mot. Il reste là, le corps nu.

Le crépitement de sa peau résonne. 


Je ne sors jamais. 

Il

M’a fait sortir. 


Je m’approche des flammes, 

sa peau est intacte, 

il regarde le vide, 

avant de me regarder. 

Il hurle. 

Il hurle. 

Il hurle et s’agite, s'agrippe aux arbres avant de s’enfuir. 


Je le suis. 

Je le suis jusque dans la forêt,

Dense foret où des feufolets dansent. 

Je vois ses flammes traverser les arbres. 


Puis dans le vide répétitif, 

au milieu d’une forêt noire

se dresse un phare. 

En feu. 

En feu le phare s’enflamme. 

Il est immense et illumine une partie du ciel. 

C' est la lune de cette forêt. 


Je ne sors jamais. 

Il

M’a fait sortir. 


L'intérieur est rempli de bougies. 

La cire coule, chaude sur le sol. 

Les escaliers s’étendent, très haut. 

Le carrelage est couvert de cire. 


C’est une chambre. 

Un lit. 

Une table de chevet, 

du papier, 

de l’encre noire. 


Écris ton rêve, Écris ce que tu n’as pas.


J’ai écrit une phrase. 

Le poids de la fatigue m’enlace, 

et sous la chaleur éternelle du phare, 

j’ai dormi, 

dormir,

enfin. 




C’est ma chambre, à l’aube. 

Les vitres transpercées par les rayons naissant du soleil. 

Pas de cire sur le sol. 

Pas de phare, 

une vision sur le jardin.

les arbres, dressant leur cimes vers le ciel. 


Dormir, 

enfin. 


C’est le rêve que j’avais écrit. 

Sur la feuille chaude, 

dans le phare, 

Fusionner avec la nuit, dormir sous le ciel étoilé. 


Je ne me souviens pas avoir rêvé, 

je me suis levé, et j’ai su que j’allais être heureux.

Je ne suis pas sorti. 

J’étais toujours chamboulé par minuit, 

le feu dans la forêt, 

hallucination dense qui reste marquée sur ma peau. 

La cire est restée coincée sous mes ongles. 


Je n’ai pas pris feu. 

J’y étais comme un démon en enfer, 

à ma place. 


Il y avait une euphorie en moi, 

le sang s’écoulait plus vite, 

le coeur tachycardique s'emmêlait dans la chair, 

et la nuit m’a enlacée sous la couette. 


Dans la forêt, j’ai parcouru la brume de Novembre pour y retrouver 

l’ombre d’un phare, 

l’ombre d’un feu béant, 

l’odeur de la cendre, et de la cire coulante, 

les flammes s’élevant vers les nuages blancs. 

Entre les feuilles et les branches dénudées, 

je n’ai pas vu le corps enflammé des briques gelées. 


L'absence effraie mon cœur. 

Le corps tremble, 

la peau s’étire et tombe, 

l’impression de mourir dans le silence. 


Minuit. 

Les flammes. 

Le phare. 

Le rêve 

Vivre encore une fois.

La chambre, 

le jardin. 

L’ombre d’un amour passé dans la maison. 

Elle est couchée face à moi,


Un pyjama trop négligé pour que l’on vienne de se rencontrer. 

Elle ouvre les yeux. 

Un baiser sur mon front. 

Ses mains dans mes cheveux, 

des lèvres douces parcourant mon cou. 


Elle se lève brusquement, 

dit qu’elle est en retard, puis s’en va. 

La maison sent son parfum, 

le spleen et la bile noire s’en sont allées. 


Des cookies sur la table, 

un mot de sa part. 

Pas d’au revoir, 

juste le son pesant de sa voix 

Je suis en retard

qui grince et grince, encore. 


Des larmes.

Le manque. 

Un laid sanglots la tête dans l’oreiller. 


Minuit. 

Les flammes. 

Le phare. 

Le rêve

Rattraper le temps

Dans la chambre au crépuscule, 

l’ombre de la mère au chevet de son enfant, 

je suis là, invisible, sous la peau de ce corps impubère. 

Ma mère caresse mon front, 

je pleure, 

j’ai le corps faible 

mes petites mains frottent mes paupières sauvagement. 

Elle se lève sans rien dire et regarde le père qui

entre dans la pièce. 

Il 

lève 

sa 

main 

sur 

elle. 

Elle tombe. 

Du sang. 

Cauchemar. 

Je me lève, 

je cours, 

je cours, 

je cours…


Le phare. 

Le rêve. 

Ressusciter

La chambre, 

la mère se lève. 

Elle m’embrasse. S’en va.

Maman !

Maman ! 

Maman ! 

Je suis accroché au lit, 

le corps dur, 

le père entre. 

Des coups. 

Des coups. 



Minuit, 

Le Phare, 

le rêve 

La Gloire 


Des millions de gens m’applaudissent dans la forêt.

La nuit noire laisse entrevoir leurs yeux blanc, 

sous la pleine lune. 

Tous applaudissent, dans un élan pluvieux sous les nuages brumeux

de la nuit.


Ils s’attirent, s’attrappent, s’enlacent, fusionnent entre les arbres morts

puis la foule s’enflamme. Je me consume avec elle, 

immolé sous la pluie, 

sous les hurlements, 

Le vent s’élève et les flammes du phare s’intensifient, 

en lumière blanche d’insomnie.  

 

En boule de feu, 

j’avance dans la forêt, 

Au loin, la maison noiratre se cache derrière ses volets. 


Le jardin luit sous la rosée du soir, 

Par la fenêtre,

j'entrevois minuit, 

et l’ombre d’un homme allongé sous une couette. 


Il sort de la maison

Qui est là ? 

Je suis en feu, 

Il s’approche de moi. 

C’est moi. 

Il est moi.

Silence, 

hurlements.


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